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Syriens en exil au liban depuis cinq ans

© Alliance Presse
Depuis cinq ans, la guerre en Syrie jette des familles sur les routes de l’exil. Derrière les chiffres étourdissants de la «crise migratoire», il y a des visages, des gens qui ont tout perdu. Nous avons rencontré plusieurs d’entre eux dans la plaine de la Bekaa, au Liban, dans des campements de fortune ou des bâtiments en construction. Reportage.
Jérémie Cavin

Le sourire chaleureux de Wafeea au moment de nous accueillir, même s’il adoucit son visage, ne peut pas cacher sa souffrance profonde. Bien sûr, elle est là avec ses six enfants, à l’abri des combats. Bien sûr, elle vit dans une sorte d’appartement aménagé par l’ONG Medair et la Commission européenne à l’aide humanitaire et à la protection civile (ECHO). Des matelas, un canapé, un poêle pour se réchauffer, une sorte de cuisine improvisée, une TV et un balcon : elle a un vrai chez-soi.
Mais pour Wafeea, cette vie n’est pas une vie. En Syrie, elle avait une bonne situation… et un mari. Quand elle se met à raconter son histoire, l’émotion est trop vive. Et contagieuse. En pleurs, la jeune mère de 35 ans remue sa douleur. Pourquoi son mari a-t-il péri dans la guerre ? Pourquoi a-t-elle été abandonnée par sa belle-famille ? La fuite vers le Liban était la seule solution, et Wafeea a pu heureusement profiter des relations de sa sœur, déjà installée dans le pays du Cèdre, pour passer la frontière sans encombre et obtenir des papiers. Ici, pourtant, à quelques kilomètres seulement de la Syrie, Wafeea ressent un stress social constant, rejetée des Libanais de cette localité méfiante à l’égard des réfugiés. «J’appartiens à la Syrie, quelle que soit la situation. Je souffre chaque jour, je me sens impuissante et incapable de continuer. Je préférerais retourner sous les bombes». Quatre de ses enfants sont assis sagement à côté d’elle, avec une sorte d’innocence que le malheur ne semble pas leur avoir encore totalement ôtée. Et eux, alors ? Ne sont-ils pas mieux ici, à l’abri de la folie des hommes ? Oui, mais Wafeea n’en démord pas : elle voudrait rentrer aussi vite que possible. Ici, il n’y a aucune perspective, aucune possibilité de scolariser ses enfants. Notre rencontre s’achève lorsque Khalid, 11 ans, et son petit frère, dévalent les escaliers. Le bus qui les emmène à une «fausse école» gratuite, mise en place par une ONG pour les réfugiés, les attend en bas de chez eux. Ils nous font un signe de main, le sourire jusqu’aux oreilles. Un paradoxe déconcertant.

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