Maintenir le dialogue avec mon ado qui ne me parle pas
«Quand il était petit, il avait toujours des choses à dire», raconte Stéphane, désabusé. «Mais depuis quelques mois, plus rien. Le moulin à paroles s’est arrêté. Par quels moyens puis-je le faire parler?»
Une étape naturelle
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Avant d’en venir à des moyens discutables et répréhensibles, il est important de comprendre ce qui se passe. «Ce n’est plus un enfant», explique la psychologue Sonja Dubouchet, «c’est-à-dire qu’il n’est plus dans la phase de “faire plaisir” caractéristique de l’enfance. Ce qui est une bonne chose, c’est une période structurante pour lui».
«L’ado tourne le dos à l’enfant qu’il était, il va être en opposition, non pas envers les personnes de ses parents, mais envers le statut de parent d’enfant qu’ils ont été. Cela prépare petit à petit cette autonomisation qui va être nécessaire pour entrer dans l’âge adulte.»
«C’est le moment de lui montrer lui votre intérêt et votre envie de rester en lien avec lui», intervient Léa Morin, éducatrice spécialisée et médiatrice familiale. «Mais ne soyez pas trop insistant, cela pourrait amener l’effet inverse et lui donner envie de garder ses distances avec vous, voire de les accentuer.»
Claude, papa de cinq garçons, a voulu s’intéresser à l’univers d’un de ses fils. Il se confie: «Je ne trouvais rien d’intéressant dans ce qu’il avait à raconter. Au début, je coupais court à chaque fois. Mais un jour, après avoir pris le temps d’écouter des choses “inintéressantes”, mon fils a commencé à s’ouvrir et à parler de vrais sujets. J’ai compris que c’était utile d’écouter, même si j’avais l’impression de perdre mon temps. Il fallait passer par cette étape obligatoire pour qu’il ait confiance en moi.»
Mais certains ados ne parlent pas à leurs parents, ni même pour leur raconter des futilités. Sonja Dubouchet reprend: «Un ado a besoin de complicité. Le dialogue, c’est d’abord éviter les sujets “relous”, éviter d’être dans les remontrances. C’est passer un temps de qualité qui répond aux besoins de la personne, sans attendre quoi que ce soit en retour. Et cela peut varier d’un ado à l’autre. Pour untel ce sera faire un jeu ensemble, pour l’autre, regarder un film ou s’intéresser à ce qui l’amuse ou le passionne sur Internet.»
Des stratégies qui tournent autour des intérêts de l’ado
Même sans connaître Sonja Dubouchet, c’est ce que Claude a fait naturellement avec son ainé. «Il est de nature très renfermée. Il n’aime pas du tout les discussions. On a donc trouvé un centre d’intérêt commun, le tennis. Il aimait ça, j’aimais ça. Pour arriver au court, cela nous prenait 40 minutes de marche aller-retour. Ces matchs de tennis sont devenus des moments privilégiés entre lui et moi. Et au bout d’un certain temps, j’ai saisi l’occasion de ces temps de marche pour ouvrir le dialogue. C’était surtout moi qui parlait au début. Je racontais mon adolescence, ce qui n’allait pas… Mais sans donner de leçons ni de morale. Puis, il a commencé à me poser des questions, à me demander comment j’avais résolu certains problèmes que lui aussi rencontrait. A aucun moment, je ne lui ai donné des solutions, seulement des pistes. Et en fonction de ce que je lui ai partagé, c’est à lui de faire ses choix.»
Mais, comme le souligne Léa Morin, éducatrice spécialisée, «il est parfois difficile de se mobiliser lorsque cela fait un moment que la situation dure avec son ado et que ce dernier peut avoir des comportements ou des propos qui viennent directement nous chercher dans nos limites et parfois même nos tripes».
Mais la situation n’est pas irrémédiable. Et Léa Morin poursuit: «Si le dialogue est complètement rompu, il y a peut-être une personne dans votre entourage qui pourrait être une référence, un modèle pour votre ado? Une personne auprès de laquelle il pourrait avoir un petit espace de dialogue? Cela insinue que cette dernière doit être capable d’être en contact avec votre enfant et de garder une certaine confidentialité des échanges qu’elle a avec lui, tout en étant capable de vous restituer en globalité ce qui ressort de l’état d’esprit de votre enfant. Passez le relai pour un temps, mais continuez la course! Car vous êtes le repère qui doit rester intemporel. La crise de votre adolescent va finir par s’estomper, gardez courage!».
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