Il a pris rendez-vous avec chacun de ses enfants
«La communication avec mes enfants est devenue naturelle. Nous parlons de tout, dans la transparence, par exemple en faisant du sport». Fabio est extrêmement reconnaissant de la relation de confiance qu’il entretient avec ses quatre enfants. A-t-il donc reçu un don particulier qui ferait défaut à d’autres pères ? Voilà une prétention dont il se garde bien ! Simplement, une rencontre avec un père de famille américain, il y a une douzaine d’années, l’a fortement inspiré : pourquoi ne pas organiser, comme cet homme, des entretiens individuels réguliers avec ses enfants ?
Depuis ce jour, Daniel et Yasmin, qui ont alors de 7 et 6 ans, sont «convoqués» par leur père pour un temps de discussion et de partage. Une habitude qui perdurera jusqu’à ce qu’ils parviennent à l’âge adulte, et que Fabio reproduira avec ses deux autres enfants, Timothée et Mélody, aujourd’hui âgés de 11 et 7 ans.
Sur tous les sujets
Le principe : «Je prépare régulièrement une rencontre thématique, en fonction des circonstances. J’ai par exemple abordé avec Timothée la question de la tolérance, en lui montrant que, de même qu’on ne peut pas visser un écrou sur un boulon sans tolérance, de même il est impossible de vivre des relations sans tolérance. Notamment avec sa sœur…». En plus de ces discussions thématiques, Fabio, tous les mois, aiguille la discussion autour de quatre axes : l’école et les relations avec les amis, les relations avec le sexe opposé, la vie de famille, la vie spirituelle.
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Un lien de confiance
Y a-t-il du répondant chez les enfants ? Au début, Fabio faisait les questions et les réponses… C’est encore un peu le cas pour les deux plus jeunes enfants, qui se réjouissent cependant de ces moments privilégiés avec leur papa. «Je suis impatient de savoir quel sujet on abordera», raconte Timothée. Sa petite sœur acquiesce : «J’aime bien parler avec papa. On discute de plein de choses, par exemple des copains d’école.»
Daniel et Yasmin, eux, ont pris l’habitude de s’ouvrir et de se confier toujours plus. L’aîné, autrefois impressionné par son père, ressentait la même émotion à devoir parler à son papa qu’en public. «Puis un lien de confiance s’est établi». De même pour Yasmin : «Quand j’étais petite, ces “entretiens” me faisaient un peu peur, car je savais que je devais avouer certaines choses. Puis, avec le temps, j’ai compris que je devais moi-même prendre l’initiative d’aborder des sujets sensibles». Sur les relations gars-filles, par exemple… La première fois qu’une histoire de cœur a fait irruption dans la vie de Yasmin, elle a préféré le garder pour elle. «Et le résultat a été catastrophique. Alors depuis, j’ai compris la nécessité de me confier aussi sur ces sujets-là». Daniel, malicieux, ajoute : «Il y avait parfois une certaine intrusion de la part de papa…». Sans rancune ! Et le jeune homme d’ajouter que, sur le plan
spirituel notamment, ces entretiens personnalisés ont eu un impact important : «J’ai retenu plusieurs principes utiles, par exemple sur la manière de lire la Bible.»
Se confier au père plutôt qu’aux copains
Daniel et Yasmin ne se rappellent pas avec précision du contenu de tous ces rendez-vous, mais ils sont unanimes sur une chose : «Avec du recul, je me demande où j’en serais maintenant s’ils n’avaient pas eu lieu.»
Un lien de confiance s’est créé. Si bien qu’aujourd’hui, alors que la formule officielle a laissé place à des discussions spontanées, les deux aînés, aujourd’hui adultes, font souvent le premier pas pour demander conseil à leur père. Lequel s’en réjouit : «L’entretien a été un moteur pour la communication dans la famille. Il était important que mes enfants apprennent à confier leurs préoccupations à leur père plutôt qu’à leurs copains. C’est au père qu’il revient de donner la morale qui régira certains comportements, non pas à des copains inexpérimentés…».
Yasmin est du même avis : «Peut-être que nos amis sont plus complaisants avec nous, mais ils nous disent ce que nous avons envie d’entendre, pas ce que nous avons besoin d’entendre.»
«Papa, tu as tort !»
Et la communication va dans les deux sens. Yasmin et Daniel ont toujours su qu’ils pouvaient, dans le cadre de ces entretiens, dire eux aussi leurs quatre vérités. Fabio laisse d’ailleurs la porte ouverte : «Je termine toujours la discussion en demandant à mes enfants s’ils ont quelque chose à me reprocher, s’ils ont remarqué des choses blessantes dans mon comportement. Je me souviens très bien que Daniel, alors âgé de huit ans, m’a fait un reproche qui m’a poussé à demander pardon et à changer d’attitude.»
Education complémentaire
Et la maman, dans tout ça ? Claire-Lise observe que le dialogue entre Fabio et leurs enfants est sorti gagnant de ces entretiens, qui ont amené à une relation de transparence. «Sinon, Fabio serait venu plus souvent vers moi pour me tirer les vers du nez.»
Mais elle n’a jamais été mise à l’écart de cette communication familiale, les enfants ayant même naturellement moins de crainte à lui confier certaines choses. «J’ai toujours eu tendance à protéger mes enfants et à leur trouver des circonstances atténuantes. Fabio est plus direct. Les deux sont nécessaires dans l’éducation». Fabio est bien conscient que sa façon d’encourager est un peu plus «virile». Il n’est pas du genre à s’apitoyer sur le sort de ses enfants. Il l’assume, même s’il reconnaît avoir peut-être quelques progrès à faire en la matière.
Il conclut par ces mots : «Ces rendez-vous font partie d’un contexte, ils ne sont pas la recette à “fabriquer” des enfants corrects. Il faut y ajouter la prière, l’éducation, les encouragements, la correction et le jeu.»
Jérémie Cavin