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Lors d’un deuil périnatal, soigner son couple

main dans la main un homme et une femme se soutiennent
© Istock
Chantal Papin, psychologue clinicienne et psychothérapeute, a travaillé dans plusieurs services hospitaliers. Elle accompagne de nombreux parents qui vivent la difficile perte d’un enfant avant ou juste après sa naissance. Entretien.

Qu’est-ce que le deuil périnatal?

Le deuil périnatal désigne le décès d’enfants nés sans vie entre 22 semaines de conception et 7 jours de vie révolus. Cela comprend les réductions embryonnaires, les fausses couches, les avortements et la stérilité. Le deuil périnatal est maintenant reconnu juridiquement. Cela permet aux parents d’inscrire leur bébé avec un prénom sur le livret de famille, donc de le faire exister. Il s’agit de deux deuils: celui d’être parent et la perte d’un objet d’amour avec tout l’espoir d’une vie enlevée qui aurait dû leur succéder.

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Cet enfant n’a existé qu’à travers les traces qu’il a laissées dans le psychisme des parents et le corps de sa mère. La perte d’un bébé est unique et reste encore tabou. Le processus du deuil de l’enfant dépendra de la place qu’il occupait dans le psychisme des parents. Il s’élabore à travers des souvenirs, or dans ce cadre-là, le travail de séparation devra composer avec des souvenirs fugaces. Quand le couple trouve un groupe, la parole se libère et l’absence de ce bébé se transforme en présence intérieure.

Quelles étapes le couple traverse-t-il?

Les répercussions de la mort d’un bébé dépendent de l’histoire de chaque parent. Il y a toujours une période d’anesthésie. La souffrance est inhumaine, seule la parole peut l’humaniser. Bien souvent la cause de la mort n’est pas connue et les conjoints connaissent la colère et la culpabilité, alimentées par les fantasmes qui pourraient avoir conditionné cette perte. Il semble important qu’ils puissent parler de leurs vécus, des faits, de l’annonce, de l’accouchement et de la rencontre avec la non-rencontre. Aujourd’hui d’ailleurs, on ne cache plus le corps de l’enfant, ce qui permet aux parents de se construire des images.

Puis d’autres comportements apparaissent: agressivité, interprétations entraînant une perte de repères dans le couple. Il perd sa fonction de contenant. Il y aura en outre une réaction dépressive, à différencier d’une dépression. Elle arrive par vague et l’évolution du couple dépendra de sa capacité de dialogue, de l’entourage et de l’aide qu’il demandera. Très souvent, il reste chez les parents un désir d’enfant pour dépasser ce qui est vécu comme un échec.

La souffrance est inhumaine, seule la parole peut l’humaniser.

Comment s’adapter l’un à l’autre quand les rythmes du deuil sont différents?

La réaction dépressive entraîne un mouvement régressif, de sidération, empreint d’agressivité et de perte d’estime de soi. La mère peut rester plusieurs mois dans sa réaction dépressive quand le père, lui, souffre de ne pouvoir sortir sa conjointe de sa tristesse. Parce que le vécu de la mère et celui du père sont différents, le dialogue va devenir difficile. Chacun cherche à protéger l’autre.

Devant la douleur, on met en place les comportements que l’on pense être bons pour soi. La vie du couple demande un travail d’adaptation. Les désirs sont différents mais cela n’empêche pas l’amour, en effet, le partage en couple permet de se soutenir et de dépasser les conflits. J’ai rarement vu des séparations au moment de la mort de l’enfant, mais plutôt après la naissance de l’enfant suivant. Il faut donc veiller sur son couple et accepter de se donner du temps.

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Sept clés pour traverser le deuil

  • Traverser ses émotions. Le chemin du deuil par l’usure de l’intensité émotionnelle permet d’arriver à une certaine sérénité malgré le manque.
  • Parler à son entourage.
  • Veiller sur son couple.
  • Expliquer aux autres enfants ce qui s’est passé, en fonction de leur âge. Ils doivent entendre qu’ils ne sont pas responsables de la mort de ce bébé.
  • Consoler les grands-parents. Ils souffrent de la mort de leur petit-enfant et de la peine de leur enfant.
  • Laisser faire le temps. Avec celui-ci, les larmes, la souffrance et la colère vont s’estomper.
  • Se reconstruire, même si la blessure sera toujours là.
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