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Gérer la violence que nos enfants visionnent

© Istockphoto
Un enfant qui aime regarder des films ou des séries violents deviendra-t-il automatiquement violent à son tour? Aux parents de créer un dialogue sain autour de ce qui est visionné.

Récemment, une série a beaucoup fait parler d’elle dans les cours d’école, de lycée et de gymnase: Squid Game (jeu du calamar, en français). Cette série coréenne déconseillée au moins de seize ans, montre des adultes surendettés jouant à des jeux typiques des cours de récréations, avec pour l’unique vainqueur une très grosse somme d’argent et pour les 99 perdants… la mort. Le spectateur est donc témoin de meurtres et effusions de sang tout au long des épisodes de la série.
Ceci n’est qu’un exemple parmi tant d’autres des images violentes auxquelles peuvent être confrontés les adolescents quotidiennement: les films, le journal télévisé, les jeux vidéo, etc. Mais pour quel impact réel? Faut-il s’inquiéter quand son enfant aime regarder ce genre de violence? Comment se positionner en tant que parent?

Une violence néfaste ou cathartique?

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Un grand nombre de chercheurs se sont demandés si regarder des films violents ou jouer à des jeux vidéo de guerre pouvait inciter à la violence. Et en effet, plusieurs études ont démontré que cela banalisait la violence aux yeux des adolescents et entraînait donc des effets négatifs. Comme l’écrit Serge Tisseron, psychiatre et docteur en psychologie dans son article «L’enfant au risque des médias» dans la revue Enfance et psy: «Les images violentes semblent bien avoir des effets statistiquement néfastes: elles augmentent le recours à des comportements agressifs, elles rendent la violence “ordinaire” en désensibilisant les spectateurs à ses effets.» Cependant, certains sont partisans de l’effet de catharsis qui se produit en regardant des films ou jeux vidéo mettant en scène des meurtres: le fait de les regarder, ou les jouer sans conséquences réelles comme dans les jeux vidéo, éviterait de passer à l’acte dans la vraie vie.

Dans un article rédigé pour le Centre pour l’éducation aux médias et à l’information (CLEMI), la psychologue clinicienne Sabine Duflo prenait le contre-pied de cette théorie: «Cette violence n’est donc pas “cathartique”: elle ne permet pas à l’enfant de se “défouler”. Cela ne substitue pas sa violence interne.» Ainsi, la violence interne de l’adolescent devrait plutôt être extériorisée,
verbalisée.

Établir un climat de confiance

De fait, en tant que parent il est important d’être attentif aux images dont «se nourrissent» les adolescents, et surtout leur demander la raison derrière ces choix. Le plus important, selon Serge Tisseron, c’est que les parents «essaient d’établir un climat de confiance dans lequel chacun évoque, en famille, les images qu’il a vues la journée et qui ont retenu son attention, que ce soit pour le réjouir, l’attrister, le scandaliser ou le laisser incrédule». Ainsi, poser des questions toutes simples de type «est-ce que tu regardes une série en ce moment? Qu’est ce que cela raconte? Qu’en penses-tu? Qu’aimes-tu là-dedans?».

Si le contenu est violent, on peut aller plus loin en lui demandant ce que de telles images provoquent chez lui? Qu’est-ce qu’il ressent en voyant quelqu’un se faire tuer? Pourquoi veut-il regarder cela? Il faut garder en tête que si la violence a été banalisée par l’adolescent c’est peut-être qu’il en a été témoin ou victime. Dans le cercle familial, à l’école ou peut-être même durant l’enfance cette violence peut avoir généré en lui une colère qu’il peut réussir à verbaliser par l’aide et l’écoute attentive et bienveillante de ses parents. Le psychiatre explique par la suite qu’un enfant grandissant dans un cadre familial paisible, aura davantage tendance à adopter cette attitude, puisqu’il aura eu un autre modèle que celui de la violence, même s’il en visionne via les écrans.

En fin de compte, il est normal qu’un adolescent désire visionner quelque chose dont tout le monde parle. Le psychiatre Patrice Huerre dans une interview pour Le Parisien conseille même aux parents dont les enfants auraient pu entendre parler de Squid Game de visionner la bande-annonce avec eux, afin de connaître leur ressenti. Ainsi, l’enfant ne se sentirait pas marginalisé vis-à-vis de ses camarades, mais saura vers qui se tourner pour parler de ce qu’il a vu.

Magazine Family

Article tiré du numéro Family 1/22 Février – Avril 2022

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