Et si on riait davantage?

L’humour, ça s’apprend (par étapes)
Qui n’a jamais joué à «Caché, coucou» avec un bébé? Avant même de savoir parler, l’enfant, qui sourit puis rit à ce jeu banal, comprend parfaitement cette forme d’humour. Il voit que l’adulte est simplement caché derrière ses mains, souligne la psychologue Julie Hoskens, auteure d’une thèse sur le développement de l’humour chez les enfants.
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L’enfant fait du second degré avant même de savoir parler, et c’est directement lié aux stades de son apprentissage de tout le reste. En premier lieu, l’enfant découvre le mimétisme (il rit s’il entend ses proches rire). Puis il va également jouer avec les mots et les détourner comme les objets; en mettant par exemple un gobelet sur sa tête en guise de chapeau. Puis, à partir de six ou sept ans, l’enfant va comprendre qu’un mot peut avoir plusieurs sens: c’est l’âge des calembours, des devinettes et autres jeux de mots.
L’humour dans les épreuves
Fred, 41 ans et papa de trois enfants, raconte: «Quand le petit dernier a fait un long séjour à l’hôpital, son frère et sa sœur étaient tristes. Alors on s’est mis à raconter les scènes rigolotes de l’hôpital avec de bonnes doses d’humour pour leur remonter le moral.» L’humour, ce peut être aussi le refuge de la pudeur, venant d’une difficulté à trouver les mots justes, même pour les adultes. «Nous avons vécu tellement de drames que les évoquer trouble parfois les plus jeunes, aussi le faisons-nous avec humour», témoigne Nicolas, 55 ans et père de cinq enfants dont certains sont adultes. Marie Anaut, psychologue et thérapeuthe familiale, abonde dans ce sens: «L’humour peut être un moyen d’exprimer des choses plus profondes, parfois un mal-être que l’enfant n’aurait pas pu exprimer autrement. L’humour est un rempart à la souffrance et permet parfois de désamorcer des choses.»
Mais avec quelles limites?
Si l’humour a de nombreux bienfaits, un changement de ton inapproprié, franchir le fil ténu entre la blague et la moquerie, forcer un enfant timide à faire des blagues ou, au contraire, lui coller une étiquette de «petit clown» peut être dommageable. L’ironie, par exemple, n’est pas compréhensible des enfants avant l’âge de sept ans, et un mot «moqueur» peut avoir des conséquences désastreuses sur leur estime d’eux-mêmes et leur imaginaire. A contrario, à partir de six ans, pratiquer l’autodérision avec son enfant l’aidera positivement: «C’est une notion essentielle pour apprendre à accepter ses échecs, ses limites et à construire une confiance en soi. L’adulte peut s’autoriser à rire plus souvent de ses travers ou mettre de la distance avec une situation agaçante du quotidien pour ainsi montrer à l’enfant qu’il est sain de rire de soi», conclut Marie Anaut.